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Netflix: ce qu'on voit et ce qu'on ne voit pas dans les films et séries de la plateforme - Le HuffPost

NETFLIX - Quand vous passez des heures de confinement et des soirées de couvre-feu à regarder des films et séries Netflix, quelle image de la société vous faites-vous? Est-ce que les héros auxquels vous vous attachez ressemblent, par leur genre, leur couleur de peau ou leur orientation sexuelle, au monde dans lequel on vit?

Pour l’évaluer scientifiquement, l’USC Annenberg Inclusion Initiative – think tank référence en matière de recherche sur les questions des représentations – a passé au crible 172 séries et 126 films originaux américains produits par Netflix entre janvier 2018 et décembre 2019. Ces contenus ont été scrutés à l’aune de 22 indicateurs d’inclusion parmi lesquels la composition du casting à l’écran (en fonction du sexe, de l’origine ethnique, de l’orientation sexuelle, etc), mais aussi derrière l’écran aux postes de producteurs, réalisateurs ou scénaristes.

Les résultats ont à chaque fois été comparés aux 100 plus gros succès du box-office “traditionnel” sur la même année, et également comparés aux données du Bureau de recensement des États-Unis qui passe la population américaine au peigne fin.

En ressort cette étude sur “l’évolution de la diversité et de l’inclusion dans les contenus originaux” de la plateforme de streaming aux 200 millions d’abonnés, rendue publique le 26 février et disponible en intégralité par ici.

Des femmes devant et derrière la caméra

Devant la caméra, 52% de ses films et séries originales contiennent des personnages féminins de premier plan comme dans “Les Nouvelles Aventures de Sabrina” avec Kiernan Shipka, “Umbrella Academy” avec Emmy Raver-Lampman ou le film “The Landromat” porté par Meryl Streep. La plateforme de streaming atteint donc la parité sur ce point-là tandis que la moyenne est encore à 41% pour les grandes productions américaines. Et derrière la caméra, la place des femmes est là aussi globalement plus importante que dans les circuits traditionnels de production.

A l’image du thriller “Birdbox” de Susanne Bier, 23,1% des films produits par Netflix sont réalisés par des femmes quand la moyenne est à 7,6% au box-office, note l’étude. “Ça, c’est pour les chiffres aux États-Unis. En France pour le cinéma, on atteint entre 23 et 24% de films réalisés par des femmes, mais toujours 76 à 77% réalisées par les hommes”, tempère Sandrine Brauer, co-présidente du Collectif 50/50 qui œuvre en faveur de l’égalité et de la diversité dans le cinéma et l’audiovisuel, contactée par Le HuffPost pour réagir à cette publication.

Lorsqu’on s’intéresse par contre au profil de ces femmes, Netflix est parfois en retard: les femmes de couleur aux postes de réalisatrices ne sont que 5,9%, contre 7,1% dans l’industrie des séries. Les dix épisodes de “Seven Seconds”, signées de la réalisatrice, productrice et scénariste Veena Cabreros-Sud, font ainsi plutôt figure d’exception.

D’après la même étude, les femmes scénaristes et productrices sont par contre au nombre de 25,2% et 29% pour les longs-métrages de la plateforme quand l’industrie affiche une moyenne de 16,7% et 19% à titre de comparaison.

Et s’il est tout aussi important d’évaluer ce qu’on ne voit pas à l’écran, dans les équipes de création des films et des séries, c’est parce que “l’inclusion arrive lorsqu’on donne les clés aux femmes et que ce sont elles qui racontent les histoires”, soutient le Dr. Stacy Smith qui a mené l’étude. “On écrit, on réalise avec son expérience de vie, donc même sans essentialiser, l’absence de femmes à des postes créatifs a évidemment un impact” dans les histoires qui sont racontées, confirme aussi la productrice Sandrine Brauer.

La place des personnages LGBTQ+, “le plus grand retard” de Netflix

L’étude commandée par le service de Reed Hastings à l’USC Annenberg pointe aussi quelques manques qui participent à “l’épidémie d’invisibilisation” de certaines minorités. C’est notamment le cas lorsqu’on s’intéresse à la place des personnages LGBTQ+ dans les films et séries de la plateforme. “Alors que 12% des Américains s’identifient comme LGBTQ+, seulement 2,3% des histoires de Netflix en font des personnages de premier plan (parmi lesquels une majorité de bisexuels, mais peu de familles homoparentales par exemple et aucun transgenre, NDLR)”, concède Bela Bajaria, vice-présidente en charge des séries.

“C’était notre plus grande surprise et notre plus grand retard dans cette étude”, souffle-t-elle. “Sur ce point, le monde dans lequel on vit aujourd’hui ne ressemble pas à ce qu’on montre dans nos productions”. 

Malgré la brillante série “Atypical” sur l’autisme, le constat est aussi en deçà de la réalité du côté de la place accordée aux personnes avec un handicap. Si elles comptent pour 27% de la population américaine d’après le Bureau de recensement, elles ne sont qu’à 11,9% représentées dans le casting des films de Netflix. Contre 14% dans les 100 plus gros succès du box-office “traditionnel” sur la même période.

L’étude de l’USC Annenberg recense aussi entre 1,7% et 5,1% d’acteurs et actrices d’origine latinos et hispaniques au casting principal des films et séries de la plateforme, tandis qu’ils représentent 12% de la population américaine par exemple.

“Je crois que nous avons été très en avance sur certains grands rôles, avec un impact important et des histoires remarquables”, commente Bela Bajaria, vice-présidente en charge des séries, “mais j’ai tout de même été choquée de voir que nous ne faisions certaines choses pas bien”.

Parmi les 22 indicateurs choisis pour cette étude, il en manque néanmoins un des plus importants pour la co-présidente du Collectif 50/50: la rémunération, résultat du processus de discrimination. “Il manque dans cette étude une partie sur les inégalités salariales”, soutient Sandrine Baurer. “En France par exemple, les chiffres sont scandaleux: la rémunération d’une femme réalisatrice est 32% en dessous de celle d’un homme, pour les scénaristes cela avoisine les 40% de moins... Or réaliser ou écrire un film ne requiert pas de capacité physiologique spécifiquement masculine.”

“Fissurer des plafonds de verre”

Si cette étude d’ampleur est une première pour Netflix, la plateforme de streaming entend travailler avec l’USC Annenberg jusqu’en 2026 pour mesurer l’évolution de ses pratiques tous les deux ans. Un exercice de transparence qui, s’il est en bonne partie plutôt exemplaire jusque-là et participe donc à la construction de l’image positive de la plateforme en faveur de l’inclusion et la diversité, a le mérite d’exister tant la publication d’études chiffrées manque encore.

“Produire des études, des chiffres, c’est le cœur de notre action. Les chiffres ont un effet levier et de conscientisation”, abonde Sandrine Brauer, à la tête de la société de production française En compagnie des lamas. “C’est à partir de données chiffrées que l’on dépasse la notion d’intuition et que démarre l’intelligence collective”.

“En comprenant mieux ce qu’on fait, on espère stimuler du changement non pas juste chez Netflix, mais aussi à travers toute l’industrie”, promet le directeur général Ted Sarandos et bras droit de Reed Hastings.

Netflix ne s’en cache pas. Si le format de la plateforme où les productions sont bien plus nombreuses que dans le circuit traditionnel offre “la liberté et l’opportunité de toucher différents publics”, cet engagement vers plus d’inclusion et de diversité permet aussi “de s’adresser à plus de gens et d’ouvrir notre audience. C’est du business en fait”, évoque Scott Stuber, vice-président de Netflix en charge des films.

“Aujourd’hui on parle de l’invisibilisation. Et même si on ne regarde pas cela exactement de la même manière selon que l’on cherche à faire des parts de marché ou que l’on cherche à mettre à mal les ruptures d’égalité, nos actions peuvent évidemment converger”, réagit Sandrine Brauer. Car si les chiffres sont une première étape et permettent de décrire un système, “maintenant il faut parvenir à fissurer des plafonds de verre”.

En parallèle de la publication de cette étude exhaustive, Netflix a annoncé la création d’un fonds mondial de 200 millions de dollars sur 5 ans, visant à favoriser l’inclusion et la diversité à l’écran et derrière la caméra. En France, quelques dizaines de milliers d’euros iront soutenir le programme de mentorat du Collectif 50/50.

A voir également sur Le HuffPost: Aïssa Maïga revient sur le “malaise” de son discours engagé aux César 2020

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