En recevant les conclusions des 184 membres de la Convention citoyenne qui avaient été tirés au sort, sur la fin de vie, Emmanuel Macron a confirmé en début de semaine son souhait d’étendre cet instrument de concertation « désormais mûr », à d’autres sujets relatifs à la vie de la Nation. Nouvel outil de la vie démocratique expérimenté pour le climat puis pour la fin de vie, l’Elysée semble avoir trouvé la panacée pour entendre -et prendre en compte ? - les attentes des Français.
En 2019 déjà, faisant suite à la crise des Gilets jaunes, le gouvernement d’Edouard Philippe avait inventé le Grand débat national. Les télés avaient abondamment relayé les images du Président en bras de chemise, tenant le micro dans des salles des fêtes bien remplies.
Donc voici la nouvelle tendance, la convention citoyenne. Elle est déclenchée en fonction du bon vouloir du Président, suivant qu’il juge que le sujet mérite ou non une concertation. Et elle repose sur un tirage au sort des participants. En donnant la parole à des anonymes, en allant chercher dans la richesse du bon sens populaire des idées nouvelles, des points de vue différents et des approches plus en phase avec les territoires, on pourrait flairer la bonne idée.
Pour autant le signal envoyé est évidemment paradoxal. En termes de confrontation avec le ressenti du peuple, le gouvernement avait une occasion en or lorsque la Première Ministre a reçu les syndicats le mercredi 5 avril, sur la question de la réforme des retraites. Mais la discussion a tourné court, la locataire de Matignon n’ayant pas ouvert sa porte pour écouter, juste pour marteler sa position.
Que dire de l’esprit de concertation qui a prévalu à l’adoption du texte sur ces mêmes retraites sans faire voter les députés, par la magie du fameux article 49.3 ? Et comment lire la suffisance voire le mépris avec lesquels le gouvernement reste sourd à ce qui se dit à longueur de cortèges dans les rues depuis plusieurs semaines ? Il y a des Français qui disent des choses mais qui sont pas dignes d’être écoutés.
La France est une démocratie avec un corps politique et ce qu’on appelle les corps constitués. Il s’agit de tous ceux qui ont une légitimité qui leur est donnée par la constitution ou les lois. Qu’il s’agisse de structures associatives, syndicales, d’organisations professionnelles, citoyennes… Les gens qui s’engagent pour les faire vivre, parfois les administrer, sont le plus souvent choisis pour leur compétence sur un sujet ou leur engagement pour leurs pairs. Ils s’informent, se forment, dialoguent en permanence avec ceux qui les mandatent, jouent le collectif. Ces Français impliqués partout dans les communes et les départements n’auraient tout à coup plus rien à dire au travers de leurs organisations et fédérations?
Même vide abyssal sans doute, de la part des 577 députés et 348 sénateurs qui rentrent chaque semaine dans leur circonscription et se font interpeller par les électeurs. Ne « remontent-ils » à Paris aucune information? Sans oublier les pétitions, les initiatives de référendums. On s'étonne que les citoyens se détachent de la vie politique et votent de moins en moins, mais on ne cesse de leur suggérer que les circuits démocratiques sont inefficaces.
Les outils pour écouter les préoccupations des Français ne manquent pas. En inventer de nouveaux n’apporte aucune garantie sur leurs chances d’être entendus.
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