Plutôt qu’aux syndicalistes, le chef de l’Etat parle aux enfants. Dans le contexte tendu de la réforme des retraites, où la parole présidentielle se fait rare, l’entretien accordé par Emmanuel Macron à Pif le mag, publié le 29 mars, n’est pas passé inaperçu. Tant pis pour Picsou Magazine et Le Journal de Mickey, le président de la République a répondu aux questions de quinze lecteurs du trimestriel, à l’heure de fêter les 75 ans du célèbre chien de la presse enfantine. Un personnage créé en 1948 par le dessinateur espagnol José Cabrero Arnal (1909-1982) pour le quotidien communiste L’Humanité.
Entre autres questions lui fut demandé ce qui lui plaisait à la tête de l’Etat. « L’échange, a-t-il expliqué, la rencontre, essayer de comprendre ce qui fonctionne et ne fonctionne pas dans les grands choix que je mets en œuvre. » D’emblée, une précision s’impose. Depuis 2020 et une énième renaissance, Pif Gadget, renommé Pif le mag, n’est qu’un lointain héritier de l’hebdomadaire créé en 1969, fleuron de la presse communiste. Son nouveau patron, Frédéric Lefebvre, ancien secrétaire d’Etat sarkozyste, s’affiche comme un soutien d’Emmanuel Macron.
Pif Gadget se trouve souvent là où on ne l’attend pas comme l’illustrent les colonnes du Monde. En février 1969, la naissance du magazine est d’abord ignorée par le quotidien. Son nom apparaît pour la première fois le 31 juillet 1970, comme un cheveu sur la soupe, au détour d’un article sur le festival d’art dramatique de Saint-Malo. Claude Sarraute, venue voir Henri IV, de Luigi Pirandello, et Les Sylphides, de Michel Fokine, semble perplexe devant la mise en musique du drame shakespearien Hamlet. « Dans le domaine des adaptations, écrit-elle, nous ne sommes pas au bout de nos surprises, de La Divine Comédie à “Pif-gadget”, pour un chorégraphe, apparemment, tout est matière à argument. » Pas sûr qu’il s’agissait alors d’un compliment.
La formule du succès
La deuxième occurrence de Pif Gadget n’est guère plus flatteuse, mais tout aussi inattendue. Le 18 octobre 1970, Le Monde explique dans une brève « faits divers » que deux enfants ont été intoxiqués à Cambrai, « après avoir absorbé le contenu d’un sachet d’encre sympathique en poudre inséré dans un hebdomadaire destiné à la jeunesse, le journal “Pif-Gadget” ». Malgré l’avertissement « Attention ! Ne pas avaler », plusieurs cas sont remontés au centre antipoison. La direction du magazine annonce avoir retiré tous les exemplaires des points de vente. Comme coup de pub, on fait mieux. Mais, en creux, l’affaire souligne le succès de la revue.
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